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Deauville, octobre 2017 |
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Deauville, octobre 2017 |
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Deauville, octobre 2017 |
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Deauville, octobre 2017 |
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Deauville, octobre 2017 |
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Deauville, octobre 2017 |
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Deauville, octobre 2017 |
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Coulemelles ramassées en forêt de Mayenne, octobre 2017 |
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Forêt de Mayenne, octobre 2017 |
Septembre nous a rendu cette belle lumière un peu molle qui tient de la pomme, de la poire et du coing, une lumière aux trois fruits d'automne. La sécheresse de l'été nous l'avait annoncé : septembre cette année sera déjà tout autre chose. J'aime bien ces années où la démarcation des jours se fait dès la rentrée des classes ; des pluies, bien sûr, mais aussi de jolies clairières dorées qui leur succèdent. C'est une fin d'après-midi comme ça.
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Forêt de Mayenne, octobre 2017 |
Je suis l'allée étroite, c'est toujours un peu Brocéliande quand le cercle de lumière s'éloigne tout au bout, et donne envie d'aller plus loin, plus profond, vers quelque chose à découvrir et qui dort en soi-même. Les fougères hésitent encore entre le roux et le vert pâle. Le sol est fauve. Les pas s'enfoncent délicieusement. Odeur des feuilles, bien sûr, à la fois presque fade et entêtante. Et puis l'odeur des champignons. Les champignons ! C'est le grand souci du moment. Après un été aussi sec, on s'était fait à l'idée de ne pas en trouver du tout."
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Forêt de Mayenne, octobre 2017 |
Quel bonheur chaque fois, de découvrir un beau champignon neuf, évident et secret ! Cette soif-là ne s'étanche pas. Elle mène les allées et le plaisir d'automne. "Une rose d'automne est plus qu'une autre exquise", écrivait Malherbe. Est-il permis de dire : "Un cèpe de novembre est plus qu'un autre délicieux" ? Peu de cèpes au demeurant [...] mais tant de ces "mauvais" qui font tout le plaisir des yeux..."
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Fontaine-Daniel, octobre 2017 |
Elle aurait bien aimé cette lumière-là. Un ciel presque bleu, mais avec ce léger voile que l'automne pose imperceptiblement sur les regards - au grand soleil de l'après-midi, quelque chose déjà semble pencher vers le soir. La lisière de la saison : les tons d'octobre commençaient à sourdre, un peu de rose-rouge sur les vignes vierges, un peu d'or pâle auréolant de douceur commençante les arbres encore verts. La veille, il avait plu, d'une pluie sauvage et lancinante qui convenait à nos tristesses. Mais ce jour-là, le rendez-vous manqué avait raison de retrouver une harmonie de tons sereines, à peine finissante, un sourire plus grave. Avec un soleil chaud pour sourire au bonheur des autres, avec une brume indécise pour souffrir à part soi, le jour ressemblait à Sylvie.
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Fontaine-Daniel, octobre 2017 |
Sur le banc déserté, quelqu'un nous manque dans l'automne."
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Le bac sur la rivière Mayenne à Ménil, août 2017 |
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Lieu-dit La Noë Foumagère, naissance de la rivière Mayenne, août 2017 |
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Le chemin de halage au bord de la rivière Mayenne, à Houssay, août 2017 |
Il y a bien des années, cela me passe par la tête, j'entrepris, c'était l'été, mon premier voyage à pied, et je me souviens que je vis toutes sortes de choses curieuses et magnifiques. Pour tout équipage, j'avais un vêtement clair et bon marché sur le corps, un chapeau bleu foncé sur la tête et un baluchon à la main. Cousues dans la poche de ma veste, sous la forme d'un chèque impeccable, j'emportais mes économies dans le monde frais, vaste et lumineux. Chemin faisant, je rencontrai une petite troupe de gamins délurés dont l'un me lança, moqueur : "Mais où va-t-il donc, ce long type avec sa petite musette ?"
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La rivière Mayenne à Sept-Forges, août 2017 |
Sans me soucier beaucoup de ces sarcasmes, qui ne pouvaient avoir aucune espèce d'importance, je poursuivis ma route avec entrain, et tout en allant de la sorte, il me sembla qu'avec moi, c'était, dans sa rondeur, le monde tout entier qui bougeait imperceptiblement. Tout avait l'air de marcher avec le marcheur : prés, champs, forêts, labours, montagnes, et jusqu'à la route elle-même."
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Le chemin de halage au bord de la rivière Mayenne, août 2017 |
Je me sentis alors l'esprit divinement libre et le cœur content. J'allais d'un pas hardi, dégagé en même temps que vif, passant devant toute sortes de gens qui me saluaient parfois aimablement, moi, jeune et fringant voyageur, vagabond vagabondant, ce qui m'obligeait à être poli à mon tour. Est-ce qu'une gentillesse n'appelle pas l'autre ?"
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La rivière Mayenne à Montflours, août 2017 |
Je me rappelle quelque chose de mouillé, de brumeux, de frisquet : ce sera le petit matin qui m'humectait de toute son humidité ; et juste après, quelque chose de brûlant, de blanc et de vert : c'était l'heure de midi avec la poussière de la route et la lumière du soleil, sèche, claire, aveuglante sur les vertes prairies."
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La rivière Mayenne à l'écluse de Bavouze, août 2017 |
Un certain temps, je longeai une rivière, puis ce fut une région montagneuse. Des collines vinrent à ma rencontre, avec des châteaux en ruine perchés sur les hauteurs. Variété et monotonie alternaient de bon cœur, villes, châteaux forts, montagnes, vallées et villages isolés. Cela dévalait au fond d'une gorge étroite, ténébreuse, sauvage, froide ; ressurgissait inopinément de la solitude et de l'étroitesse rocheuse, fuyait sous forme de plaine ou scintillait et souriait en tant que pimpante rivière bleue, ou encore, cela se dressait dignement et vaillamment sous la forme d'une forêt grave, ingénue, verte, pour replonger brusquement vers le haut en tant que montagne ombrageuse."
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La rivière Mayenne et le château de La Porte, à Ménil, août 2017 |
Quelque chose d'étrange et d'aventureux allait de pair avec quelque chose de beau, de recueilli, et vers le soir, la clarté de midi se muait en une pénombre mystérieuse, délicieuse, très bienfaisante, et la chaleur en fraîcheur douce et agréable."
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Église de Ménil, août 2017 |
Ô, quelle joie saine, bienfaisante, procure la marche. Il n'y a de joies véritables que celles qui sont innocentes."
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Marronniers d'Inde au bord de la rivière Mayenne, août 2017 |
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Galerie du Palais-Royal, août 2017 |
Elle avait oublié de me faire part de l'étrange aventure qui lui est arrivée hier soir, vers huit heures, comme, se croyant seule, elle se promenait à mi-voix chantant et esquissant quelques pas de danse sous une galerie du Palais-Royal. Une vieille dame est apparue sur le pas d'une porte fermée et elle a cru que cette personne allait lui demander de l'argent. Mais elle était seulement en quête d'un crayon. Nadja lui ayant prêté le sien, elle a fait mine de griffonner quelques mots sur une carte de visite avant de la glisser sous la porte. Par la même occasion elle a remis à Nadja une carte semblable, tout en lui expliquant qu'elle était venue pour voir "Madame Camée" et que celle-ci n'était malheureusement pas là. Ceci se passait devant le magasin au fronton duquel on peut lire les mots : CAMÉES DURS. Cette femme, selon Nadja, ne pouvait être qu'une sorcière."
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Jardin du Palais-Royal, août 2017 |
Il se peut que la vie demande à être déchiffrée comme un cryptogramme. Des escaliers secrets, des cadres dont les tableaux glissent rapidement et disparaissent pour faire place à ceux qui doivent avancer toujours, des boutons sur lesquels on fait très indirectement pression et qui provoquent le déplacement en hauteur, en longueur, de toute une salle et le plus rapide changement de décor : il est permis de concevoir la plus grande aventure de l'esprit comme un voyage de ce genre au paradis des pièges. Qui est la vraie Nadja, de celle qui m'assure avoir erré toute une nuit, en compagnie d'un archéologue, dans la forêt de Fontainebleau, à la recherche de je ne sais quels vestiges de pierre que, se dira-t-on, il était bien temps de découvrir pendant le jour - mais si c'était la passion de cet homme ! - je veux dire de la créature toujours inspirée et inspirante qui n'aimait qu'être dans la rue, pour elle seul champ d'expérience valable, dans la rue, à portée d'interrogation de tout être humain lancé sur une grande chimère, ou (pourquoi ne pas le reconnaître ?) de celle qui tombait, parfois, parce qu'enfin d'autres s'étaient crus autorisés à lui adresser la parole, n'avaient su voir en elle que la plus pauvre de toutes les femmes et de toutes la plus mal défendue ? "
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Jardin du Palais-Royal, août 2017 |
J'ai pris, du premier au dernier jour, Nadja pour un génie libre, quelque chose comme un de ces esprits de l'air que certaines pratiques de magie permettent momentanément de s'attacher, mais qu'il ne saurait question de se soumettre... J'ai vu ses yeux de fougères s'ouvrir le matin sur un monde où les battements d'ailes de l'espoir immense se distinguent à peine des autres bruits qui sont ceux de la terreur et, sur ce monde, je n'avais vu encore que des yeux se fermer. Je sais que ce départ, pour Nadja, d'un point où il est déjà si rare, si téméraire de vouloir arriver, s'effectuait au mépris de tout ce qu'il est convenu d'invoquer au moment où l'on se perd, très loin volontairement du dernier radeau, aux dépens de tout ce qui fait les fausses, mais les presque irrésistibles compensations de la vie."
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Jardin du Palais-Royal, août 2017 |
Elle était forte, enfin, et très faible, comme on peut l'être, de cette idée qui avait toujours été la sienne, mais dans laquelle je ne l'avais que trop aidée à donner le pas sur les autres : à savoir que la liberté, acquise ici bas au prix de mille et des plus difficiles renoncements, demande à ce qu'on jouisse d'elle sans restrictions dans le temps où elle est donnée, sans considération pragmatique d'aucune sorte et cela parce que l'émancipation humaine à tous égards, entendons-nous bien, selon les moyens dont chacun dispose, demeure la seule cause qu'il soit digne de servir. Nadja était faite pour la servir..."
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Galerie du Palais-Royal, août 2017 |